Nick Cushing est parti pour de nouvelles aventures.
Son bilan : six ans, six trophées. Le coach part sur une victoire contre son adversaire direct, contre une équipe qu’il avait réussi à battre pour décrocher le premier titre de City en football féminin.
Le football a décidément le sens de l’humour.
Quand Nick Cushing est arrivé pour devenir le premier manager de l’équipe professionnelle de City en 2014, peu de gens auraient pu prédire les six années à venir – et la vitesse à laquelle les nouvelles venues en FA Women’s Super League pourraient se développer pour devenir des challengeuses sérieuses sur tous les fronts, y compris en Champions League.
Cushing ne manquait pas de pedigree – même s’il n’avait jamais entraîné une équipe senior, c’était un habitué du City Football Group et de sa philosophie : il avait déjà été à la tête de l’académie depuis 2007. Passionné de beau jeu, Cushing a coaché Phil Foden, Taylor Harwood-Bellis, Tommy Doyle, Rowan McDonald et Cole Palmer dans leur parcours chez les jeunes. Tous ont fait leur apparition dans les rangs de l’équipe première.
Il connaissait le club par cœur et était ravi d’endosser le rôle d’entraîneur de la première équipe professionnelle de football féminin. Ce choix – tant pour Cushing que pour le club – s’est avérée payante.
Pourtant, tout n’a pas toujours été facile. Après une victoire serrée contre Reading en FA Women’s Cup, City subissait quatre défaites d’affilée – la vie en championnat a été difficile pour le nouveau cocach et sa nouvelle équipe, composée de cinq stars internationales et de semi-professionnelles venues de l’équipe amateur de City.
Notre chance a tourné une après-midi de mai 2014. C’était à l’Etihad Stadium où, cinq ans plus tard, l’équipe féminine de City battait le record d’affluence lors du premier derby professionnel contre Manchester United. En 2014, le match contre Everton en Continental Cup était quelque peu brouillon. L’issue du match s’est décidée dans les arrêts de jeu sur un but de Natasha Flint, un but qui allait débuter une série de bien meilleurs résultats.
Les résultats en première division étaient mitigés... Mais City s’est embarqué sur une impressionnante série en Continental Cup. Les Skyblues ont fini premières de leur groupe avant d’éliminer Chelsea pour affronter Arsenal – le club le plus prolifique du football féminin – en finale.
Contre toute attente, les challengers ont produit une performance inspirée et combattive pour préserver une clean sheet. De l’autre côté du terrain, les joueuses ont été magiques, avec un superbe centre de Krystle Johnson pour Izzy Christiansen, qui inscrit le but de la victoire de la tête, pour décrocher le premier trophée majeur pour le club dans des circonstances improbables.
« Dans cette équipe, les internationales anglaises ont beaucoup aidé lors de cette première saison pour développer un environnement favorable. Elles ont pris le leadership », se souvient Cushing.
« Arsenal dominait le football féminin depuis longtemps, on est arrivés de nulle part. Arriver et battre Arsenal 1-0 alors qu’on était sous pression, ça nous a donné la foi. À moi en tant que coach, et à l’équipe, pour pouvoir croire qu’on pouvait rivaliser avec des équipes de haut niveau.
« Remporter ce trophée a mis l’équipe en condition pour gagner des titres. »
Malgré la disette de la saison suivante, City a combattu pour le titre en championnat, poussant Chelsea jusque dans ses derniers retranchements tout en s’assurant une place en Champions League pour la première fois de son histoire. Attirées par le projet et le professionnalisme du club, des joueuses du monde entier suivaient nos progrès. De son côté, Cushing, qui voulait aider des joueuses à atteindre leur plein potentiel, recrutait de jeunes talents britanniques. Beaucoup d’entre elles ont depuis rejoint leur sélection et ont participé à des tournois majeurs.
La saison suivante a été la plus mémorable. Cushing a mené City à son premier titre en WSL et à son second en Continental Cup – et avec style. City n’a pas seulement été champion. Les Skyblues n’ont pas perdu un seul match de championnat. C’était l’un des plus beaux jeux que l’on avait vu en WSL. Le style que le coach a toujours voulu développer.
« Au début de l’année 2016, on était vraiment motivés à soulever un trophée », ajoute Cushing.
« La victoire appelait la victoire, et on avait une équipe qui avait le potentiel. On devait juste s’assurer de maintenir notre niveau de jeu jusqu’à la fin de la saison (après la trêve hivernale).
« Soulever la WSL sans avoir perdu un seul match était une sensation incroyable. On a dominé le championnat, cette année. On a battu Chelsea une fois, Arsenal deux fois. On n’a pas perdu et on n’a encaissé que quatre buts cette saison-là, dont trois pénaltys. Nous n’avons donc concédé qu’un seul but dans le jeu. »
« Quand je regarde cette saison avec le recul, même si d’autres équipes ont fait des saisons sans perdre, je pense que personne ne pourra faire mieux que nous. »
C’était le beau jeu de City – un jeu basé sur l’attaque, une défense solide, le professionnalisme et l’attitude – qui a permis au football féminin de franchir une étape. À ce jour, la capitaine Steph Houghton déclare qu’elle a toujours su que Cushing apporterait le succès au club, et qu’elle est l’une de celles qui ont vu en le manager de 35 ans « le meilleur coach qu’elles aient eu ».
« Depuis le moment où j’ai rencontré Nick – à la première session d’entraînement – je savais à quel point il serait bon en tant que coach et manager de cette équipe », a-t-elle déclaré.
« Je serai toujours reconnaissante pour ce qu’il a fait pour moi en tant que joueuse et personne. Il a été incroyable. Il a mis l’équipe au premier plan. »
« Je ne peux rien dire de mauvais sur lui, même si on s’est disputés quelques fois ! Au final, son envie d’être le meilleur et de gagner quelque chose m’a vraiment impressionnée. L’avoir eu comme entraîneur a été un honneur incroyable.
Interrogée à propos de ce qu’elle préfère chez Cushing, chaque joueuse mentionne son attention au détail et son enthousiasme, saluant au passage sa personnalité détendue et doté d’un sens de l’humour certain – malgré son apparente sévérité !
Cushing a conduit City à d’autres succès en 2017. La première aventure européenne en Champions League s’est conclue en demi-finale – un exploit reproduit la saison suivante. À deux reprises, City chutait contre les vainqueurs, Lyon.
Un premier succès en FA Cup a eu lieu en 2017, devant un public record à Wembley. Cushing voit cet événement comme l’un des moments phares de sa carrière, surtout en voyant son fils Frankie sortir en tenant la main à la capitaine Steph Houghton.
La famille de l’entraîneur a joué un rôle clef dans l’aventure de City. Le manager a toujours exprimé sa gratitude à sa femme claire pour son soutien et sa compréhension vis-à-vis de son travail – surtout lorsqu’elle a accouché de leur fille lors de la finale de Continental Cup en 2016 !
Bizarrement, les enfants de Nick ont tendance à naître dans des circonstances inhabituelles – son aîné est né dans une voiture sur l’A41, deux jours avant le camp d’entraînement de présaison à La Manga. Sa petite dernière Heidi a gentiment attendu la fin de la finale de coupe (temps additionnel compris, bien sûr) pour pointer le bout de son nez.
« Je me souviens clairement de la finale de Cup ! » confie Cushing dans un rire. « On savait que l’accouchement serait provoqué le 2 octobre si Heidi n’était pas née. Mes fils sont nés tôt. Pour sa part, elle est née avec deux semaines de retard.
« C’est arrivé le 2 octobre. On est allés à l’hôpital à 9 heures, l’accouchement a été déclenché. Je me suis assis à côté d’elle jusqu’à 13h et je suis parti pour le match. On a joué le match et, forcément, c’est allé jusqu’aux prolongations ! »
« Ça faisait 0-0 et Lucy Bronze a marqué de la tête. J’ai ensuite eu un appel pour dire que le travail avait commencé et que le bébé allait naître ! Je suis arrivé à l’hôpital à 19h01, Heidi est née à 19h05 !
La saison 2017/18 allait se terminer de manière décevante : City a manqué le championnat de peu, la Continental Cup et la FA Cup aussi et une défaite inhabituellement précoce en Champions League nous a empêché d’aller plus loin. L’équipe de Cushing allait goûter au succès une fois de plus la saison suivante, avec un doublé national.
Le club pourrait encore décrocher le doublé cette saison, mais il faudra le faire sans Cushing. Il y a cinq semaine, on a appris que le coach allait embarquer pour de nouvelles aventures en devenant adjoint au New-York City FC.
La victoire cruciale ce dimanche contre Arsenal était son dernier match en tant qu’entraîneur – et quelle façon de partir. Cushing quitte le club en étant premier du championnat. Une position parfaite pour aller décrocher le deuxième titre en championnat. L’équipe est par ailleurs encore en lice pour décrocher la FA Cup.
Même s’il nous manquera à Manchester, c’est une très bonne chose que le manager reste dans le City Football Group. »
« Ce club, c’est ma vie », explique le technicien. « C’est la raison pour laquelle j’ai toujours voulu rester dans le groupe si c’est une option. On a été si bons dans notre développement... J’ai toujours dû me dépasser, c’est la prochaine étape de mon voyage. »
« J’ai beaucoup à apprendre de Ronny Deila, de New York et de la MLS. Ensuite, je pourrai revenir en tant qu’entraîneur titulaire, que ce soit pour l’équipe masculine ou féminine dans le groupe. »
Ça ne signifie pas que la décision a été facile à prendre. Cushing a admis qu’il a toujours su qu’il aurait le cœur brisé de partir – peu importent les circonstances – mais qui manquerait une opportunité de commencer une nouvelle vie à New York City ?
Tous ceux et toutes celles qui connaissent Nick lui souhaitent le meilleur, y compris les gens d’autres clubs. Son dévouement au football féminin, sa personnalité adorable et sa connaissance incroyable ont été reconnus dans tout le pays – et au-delà – et il mérite beaucoup de succès lors de sa carrière.